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La jeunesse de Laberthonnière

LA JEUNESSE DE LABERTHONNIERE
Lucien Laberthonnière - Marie-Thérèse Perrin - Beauchesne - 1980

Un jour, au milieu du plus profond orage que mon cœur ait éprouvé jusque-là, avec la soudaineté d’un éclair, l’idéale beauté du vrai est venue illuminer mon âme, et plane maintenant sur mon intelligence comme un pur soleil de printemps. Depuis ce temps, je me suis dit : « Qu’importe tout le reste ! Qu’importe que je sois prêtre ou soldat, puisque partout et toujours on peut aimer la vérité et trouver dans cet amour la force de la vertu »
JL p 61

J’éprouve une impression étrange. Je n’ai pensé à rien aujourd’hui, je n’ai point vécu par conséquent. Mes sens ont été frappés, mais mon âme a dormi ; elle se réveille, et honteuse de voir qu’elle a été asservie aux choses extérieures, revenue à sa solitude, elle sent le vide des heures écoulées ! … JL p 63

Il faut des professeurs, des livres : mais ces livres, ces professeurs ne doivent être pour nous que des moniteurs, des excitants et non des autorités… Les meilleurs professeurs, comme les meilleurs livres, sont ceux qui nous font le plus réfléchir, et non ceux qui nous donnent un ramassis de formules, comme une science toute faite que nous n’avons plus qu’à apprendre de mémoire. Cette science-là, les perroquets en sont capables…La réflexion, et toujours la réflexion, voilà la chose importante.
JL p 69

« J’ai rêvé et j’ai souffert, je ne suis plus un naïf. Dans ma soIitude, ma pensée a voyagé… de ses voyages et de ses vagabondages, mon âme est revenue quelque peu brisée. Et pourtant je suis resté chrétien, je suis devenu chrétien plus convaincu, chrétien philosophe… Depuis que i’ai commencé à penser, toute ma vie intellectuelle s’est concentrée sur les bases du christianisme. »
Je suis chrétien et j’aime la science… Oh oui, je l’aime ! et ce que j’aime, c’est votre science moderne, avec tout l’enthousiasme de ma jeunesse. Mon rêve, mon rêve unique, c’est d’y vouer tous les jours de ma vie. A toi, ô science, ô philosophie, les amours de ma vingtième année. Rien ne pourra m’empêcher de t’aimer. La religion et toi vous êtes deux sœurs : deux filles d’un même père ; vous êtes divines l’une et l’autre…Je t’ai aimée et cet amour m’a sauvé de bien des abîmes. Par toi je connais Dieu et je découvre les beautés du christianisme… « Foi et science sont deux sœurs, filles d’un même père. » JL p 70

« Qu’est-ce que philosopher ? C’est aimer et rechercher personnellement la Vérité. J’existe, en moi il y a tout un monde qui s’appelle la pensée. Qu’est-ce que c’est que tout cela ? Qui suis-je ? D’où viens-je ? Quel est le but de ma vie ? Qu’est-ce que le monde qui m’entoure ? »
JL p 79

Frappés de tous les mystères qui nous entourent, saisis par l’énigme de notre vie qui se dresse devant nous, nous sentons s’échapper de notre cœur ce cri impérieux : j’ai besoin de voir. Victor Hugo a dit que chaque année une erreur tombait de son front ; pour moi je crois bien qu’il m’en tombe une au moins tous les mois. Mais j’ai au milieu de tout cela le sentiment intime qui fait la joie de mon âme, c’est que la lumière va grandissant. Ce cri : j’ai besoin de voir m’échappe encore. JL p 80

Je sais bien que tu es là. Je ne doute pas de toi. J’ai pensé et je t’ai vu. Tu es l’infini vivant que j’adore. Je te reconnais comme la source de ma vie. Tu es en moi plus que je n’y suis moi-même. Mais enveIoppé par toi, il me semble que je suis perdu dans quelque chose d’immense, isolé dans une éternité. Qui donc es-tu, ô Dieu, et qui suis-je moi-même ? Puisque je viens de toi, il faut bien qu’il y ait une parenté entre mon être et le tien.
JL p 93

Il ne suffit pas d’avoir la science et de raisonner, il faut vivre, vivre ce que l’on veut faire comprendre.
JL p 99

Je suis de ceux qui croient que les nœuds qui ne peuvent être dénoués doivent être tranchés.
JL p 102